Un nouveau cahier pour la rentrée ! Pour le troisième numéro du semestriel de l’Ibois (le laboratoire des constructions en bois de l’EPFL), Christophe Catsaros et Yves Weinand continuent de questionner le rôle de la construction bois dans l’évolution architecturale, à travers les récits transversaux et transdisciplinaires de leurs invités. Alors que la pierre s’est vue remplacée par le béton, synonyme de progrès et de modernité, qui semblait rendre possible un urbanisme plus rationnel et prétendait offrir hygiène et stabilité, on peut aussi expliquer sa prédominance par l’angoisse engendrée par la guerre. Celle de notre époque est davantage liée aux perturbations du climat et, bien que « l’ampleur et le type de menace sont différents, la façon dont elle façonne les mentalités n’est pas sans rapport ». On peut alors se demander si le bois trouvera à son tour une place, mais surtout une identité propre, sans imiter les comportements des matériaux modernes. En ce sens, l’art de l’assemblages pourrait redéfinir « l’art de bâtir » et rendre la part belle à l’ingéniosité des structures, plus qu’au calcul de rationalisation de surfaces. Stéphane Berthier, maitre de conférences à l’ENSA Versailles et chercheur au LEAV au sein de la même école, explore tout d’abord les assemblages de la charpente en bois : taillés, métalliques, puis numériques, leur évolution offre diverses possibilités. L’emploi des outils numériques laisse entrevoir une nouvelle manière d’appréhender la structure, en caractérisant la propriété morphologique du bois à combiner, plus qu’en réalisant, comme on le fait massivement aujourd’hui, de lourdes transformations. Mario Rink, professeur à la Faculté des Sciences du Design de l’Université d’Anvers et cofondateur de l’International Association of Structure and Architecture, explore les régularités des formes, inhérentes aux matériaux de la structure. Il compare comment chaque nouveau matériau de construction s’impose en premier lieu en traduisant littéralement son prédécesseur. Le bois industriel, façonné dans n’importe quelle forme et section à partir de lamelles suit sans aucun doute cette évolution. L’auteur questionne alors l’avenir de cet attachement à la forme, auquel il préfèrerait une perspective circulaire : faciliter le démontage dans un objectif de durabilité des éléments de structure eux-mêmes. Sandra Vuilleumier, aujourd’hui chargée de communication à l’Ibois, a un parcours multiculturel : diplôme de philosophie axé sur l’environnement et les changements sociétaux, docteure et analyste de recherche. Elle s’intéresse, pour ce cahier, au bois brut irrégulier à usage structurel, dressant les contours d’une nouvelle approche de conception grâce au scannage laser et à la génération de modèles en conception assistée par ordinateur, ainsi que les freins liés à la foresterie notamment, qui bloquent ce développement. Son format de poche et sa conception graphique participent à rendre la lecture de ce troisième cahier agréable, en plus d’être passionnante, bien ancrée dans les problématiques actuelles et permettant d’ouvrir le débat.

LES CAHIERS DE L'IBOIS 3, Stéphane Berthier, Christophe Catsaros, Mario Rinke, Sandra Vuilleumier, 2022, 208 pages, 28,35 €