Dossier réalisé par Anne-Sophie GOUYEN Au moment où la RE2020 incite à décarbonner, et où la crise énergétique impose plus que jamais des rénovations avec ITE pour lesquelles le bardage bois est la solution la moins émissive, l’heure du revêtement de façade en bois pourrait bien revenir sur le devant de la scène. Les solutions qu’offre le marché du bois pour la façade sont nombreuses et les concepteurs dont l’objectif est moins de dessiner une belle façade, qu’une façade qui dure, doivent essayer de s’y retrouver, surtout s’ils sont demandeurs de produits naturellement durables sans traitement chimique. |
Le contexte actuel d'évolution de l’offre et de la demande reste imprévisible. L’arrivée de la RT2012 annonçait les mêmes changements, mais les choses ne se sont pas passées comme on le pensait pour le bardage, les municipalités de certaines grandes villes allant même jusqu’à interdire le bois apparent en façade : le marché du thermo-traitement a sombré et les revêtements incombustibles et inertes se sont imposés plus que jamais. Pourtant, selon une étude de Jean-Marc Mornas pour l’association LCB, présentée il y a un an, le marché des bardages bois a bénéficié d’un contexte favorable en 2020, « dû notamment à la crise sanitaire qui a poussé les ménages français à réaliser des travaux d’amélioration de l’habitat », avec une augmentation des ventes de +25 % entre 2019 et 2021, le douglas restant l’essence émergente. Ce sont les bardages pré-grisés avec saturateurs qui progressent le plus (douglas, mélèze, red cedar, épicéa). Le grisaillement homogène semble désormais accepté, mais la phase disgracieuse de la décoloration inégale des bois exposés reste redoutée. La vente de bardages naturels a peu progressé, signe de cette méfiance, tandis que l’offre de bardage autoclave reste stable, s’étant elle aussi aussi adaptée, à cette demande.
Il ne s’agit plus vraiment d’empêcher le grisaillement, mais plutôt les coulures, la rétention d’eau menant à la pourriture, et si possible l’encrassement dans les zones polluées : et cela ne peut être fait qu’en conception. Or, l’entretien régulier des façades, pourtant essentiel en bardage bois, reste exclu à la fois par l’absence de réponses architecturales pour le faciliter, et par les budgets de conception et de fonctionnement qui ne le prennent pas en compte. La maintenance était pourtant courante dans le passé, ou dans d’autres cultures, si l’on se réfère à la mosquée de Djenné, aux ponts Inca, ou encore aux temples japonais. Cette occultation de l’entretien, qui sait, pourrait évoluer.
De sorte qu’en termes de protection du bois en façade, tout est encore à inventer. Alors que certains procèdent en éliminant la façade au profit de la structure bois protégée par du verre ou du polycarbonate, d’autres réinterprètent des pratiques ancestrales de protection, comme le bois brûlé. Le rouge de Falun, tout comme la palette de couleurs des peintures silicates ne sont pas très exploitées, les concepteurs semblent plus attirés par les solutions qui exposent le bois au plus près de sa teinte naturelle, dans une volonté de matière la plus brut possible. Pour cela, seule une bonne maitrise, que certains appliquent avec l’élégance de leurs détails, rend possible une bonne durabilité du bois en façade. Il s’agit donc, sans doute, de passer d’une protection défensive de préservation à une protection offensive d’affirmation de la matière.
En résumé, la protection du bois en façade reste essentielle, mais elle ne peut se dissocier d’efforts de conception pour une bonne mise en oeuvre et une anticipation de l’entretien et de maintenance qui sera nécessaire. Dans le contexte actuel, les concepteurs ne peuvent plus se satisfaire du choix de revêtements incombustibles sous prétexte qu'il faut mettre le bon matériau au bon endroit. Une belle façade biosourcée n'est pas le luxe, c'est simplement un art. Encore faut-il savoir, tenter, et progresser au rythme des produits qui, eux-aussi évoluent.