Dossier réalisé par Sarah ADOR Début 2022, des panneaux publicitaires parisiens s’habillaient d’affiches annonçant l’exposition TerraFibra au Pavillon de l’Arsenal, qui présentait jusqu’au 27 février les 40 projets finalistes du 3e prix international de la construction en terre crue et fibres végétales. Rarement avait-on vu la construction biosourcée ainsi à l’honneur auprès du grand public. Cela ne manquera pas de stimuler des commandes. Il était donc temps pour nous d’étudier en détail les complémentarités du « nouveau B.T.P. » : bois – terre crue – paille. |
La construction bois ne permet pas à elle seule de répondre à tous les enjeux acoustiques et thermiques du bâtiment. Pour cela, nous avions déjà évoqué les isolants biosourcés dans Séquences bois 118 & 132. Déphasage thermique, régulation de l'hygrométrie, affaiblissement acoustique, confort sensible : voilà des qualités complémentaires que peut apporter la terre crue pour construire des bâtiments aussi sains que performants. Si le bois et ses dérivés ont à leur grand avantage de permettre des structures comparativement légères. Seuls les matériaux lourds sont capables de dissiper les énergies thermique et acoustique. Les structures hybrides bois-béton sont bien connues et maîtrisées ; les hybrides boisterre crue (ré)adviendront progressivement de même.
La terre crue apporte une performance autrement plus utile que le béton de ciment : elle reste totalement ouverte à la vapeur d’eau et capable de la réguler. Quand les matériaux minéraux et synthétiques nécessitent des parois complexes pour les protéger de la vapeur d’eau et maintenir leurs performances au niveau théorique, la terre crue permet de réaliser des parois d’une ou deux matières seulement, sans frein-vapeur, sans pare-pluie, etc. En effet, elle régule son hygrothermie et permet d’exploiter la thermique des changements de phase de l’eau (la condensation hivernale dégage de la chaleur, l’évaporation estivale en prélève). De ce point de vue, l’optimum des performances est atteint par la terre allégée en copeaux de bois : la combinaison des matières augmente significativement l’inertie et la résistance thermique. Dans ce dossier, nous nous penchons en particulier sur les produits en terre crue utilisables sous forme de cloisons monolithiques et de doublage, dans les constructions en bois ou dans le cadre de structures hybrides. Le chemin de la normalisation, qui facilitera l’assurabilité, est à ce jour un enjeu majeur pour le développement ces techniques.
À cette fin, la Confédération de la construction en terre crue (CCTC) chapeaute depuis 2021 un Projet national terre crue, sous l’égide du Commissariat général au développement durable (ministère de la Transition écologique), qui vise à développer « des outils de dimensionnement, de conception, de mise en oeuvre et de formation à destination des bureaux d’études et des contrôleurs techniques, en lien étroit avec les assureurs ». Les techniques de la terre crue couvrant le champ de la maçonnerie jusqu’au remplage, en association systématique avec le bois, toute étude s’appuie sur les Eurocodes 5 et 6 et les D.T.U. des séries 20 et 31. Dans les faits, plusieurs ATEx permettent déjà de réaliser des ouvrages en technique courante et de nombreuses réalisations en technique non courante montrent que l’assurabilité n’est pas un frein insurmontable.[...]