La conversion d’un four communal en maison de vacances montre que l’intérêt des architectes portugais pour l’architecture traditionnelle se double désormais de préoccupations environnementales valorisant les matériaux naturels.
L’habitat vernaculaire occupe le débat architectural portugais pendant une bonne partie du XXe siècle. Vecteur d’identité nationale pour les uns, préfiguration de l’architecture moderne pour les autres, il est emporté par la modernisation des années 80 et les grands changements sociaux qui le détruisent au moment où, en grande partie grâce aux recherches des architectes*, il n’a jamais été aussi bien connu et documenté. Il disparaît sous les ravalements de céramique ou se voit remplacé par des maisons plus cossues mariant les codes de l’habitat populaire avec ceux des pavillons de banlieue. La maison réhabilitée par Henrique Barros-Gomes à Aldeia de João Pires doit sans doute sa préservation à la désertification qui touche la région de Beira comme d’autres zones agricoles du centre de l’Europe. Ce n’est d’ailleurs pas une maison à proprement parler, mais un four communautaire inutilisé depuis plus d’un demi-siècle, propriété d’une médecin lisboète originaire du village qui a souhaité en faire une maison de vacances occupée principalement l’été.
Entre savant et populaire
Henrique Barros-Gomes a abordé ce bâtiment existant à la manière d’un objet trouvé, un ready made rural tenant ses qualités artistiques de ses parois maçonnées de granit, exceptionnelles par leur texture. Le projet installe dans cette enveloppe populaire la quintessence de l’architecture savante : une réinterprétation du magasin Olivetti conçu par l’architecte Carlo Scarpa à Venise, dans une note légèrement rustique plus accordée au contexte. La transformation a débuté par la dépose du toit et la surélévation des murs, afin d’augmenter le volume habitable et créer un niveau de mezzanine. [...]
*culminant avec l’ouvrage Arquitectura popular em Portugal, publié en 1961 par des architectes modernistes de Lisbonne et Porto opposants au régime salazariste.