Grâce au développement de l’écologie et de l’éthique du care, le regard porté sur les processus de guérison tend progressivement à se déplacer du prisme purement médical à une prise en compte plus générale de la sanité de nos environnements quotidiens, des matériaux dont ils sont faits, et des sensations et émotions qu’ils suscitent. Pour Julien King Georges, qui a récemment rénové le groupe médical Laennec, à Capavenir Vosges (88), l’usage de matériaux naturels répondait à un objectif primordial, rappelé aux médecins pour justifier son choix : « dans un cabinet médical, il ne faut pas qu’on y entre pour tomber malade. Compte tenu de l’état dans lequel ce cabinet se trouvait, la question méritait d’être posée.» Véronique Wallon, ex-inspectrice générale des affaires sociales, témoigne de cette évolution : « Si la capacité du système de santé à assurer techniquement les meilleurs soins dans un cadre financier soutenable a orienté depuis plusieurs décennies les priorités de politique publique, la vision curative et spécialisée de la santé est progressivement interrogée : les impacts de la qualité de l’alimentation, du logement et de l’environnement, des conditions d’éducation et de travail, plus globalement des modes de vie sur la santé sont progressivement documentés ». La multiplication depuis quelques décennies des « Maggie’s Centers », ces centres de grande qualité architecturale destinés aux patients atteints de cancer (voir notre article p.34), est une des initiatives qui remet en valeur le rôle que l’architecture a à jouer dans le secteur de la santé, en s’appuyant sur les notions de restorative environnement (environnement réparateur) et de « paysages thérapeutiques ». Si cette tendance fait un certain écho au mouvement hygiéniste du XIXe, qui a contribué à la naissance de l’urbanisme, et à la grande époque des sanatoriums, il s’appuie désormais sur des données scientifiques, qui intègrent désormais, au-delà de l’approche purement spatiale et environnementale, des connaissances précises sur les propriétés des matériaux. C’est ainsi que le bois, longtemps décrié pour sa porosité et sa naturalité, supposée l’exposer à la prolifération bactérienne, est ainsi en train de se défaire d’a priori obscurantistes et de se révéler sous un jour beaucoup plus favorable à l’égard du secteur médical, où il s’avérerait en fait un des matériaux les plus adaptés. Compte-rendu d’une étude réalisée en 2019, le rapport « Wood-Health » produit par France Bois Industries Entreprises (FBIE) établit, outre des pistes d’évolution pour la filière dans ce secteur, un état de l’art conséquent des connaissances. Réalisé en collaboration avec l’Institut Technologique Forêt Cellulose Bois et Ameublement (FCBA) et le soutien financier du CODIFAB, il intègre l’expertise de la docteure en biologie Florence Aviat, dirigeante de YouR ResearcH Bio Scientific, qui propose un focus scientifique sur les recherches notamment japonaises, australiennes et autrichiennes qui ont récemment prouvé l’impact des environnements intérieurs en bois sur la santé des patients, notamment pour les publics sensibles comme la petite enfance et les personnes âgées ou atteintes de maladies mentales.
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